Quand la presse locale se fait l'écho de la petite histoire de Saint-Éman...
Au fil des pages du Journal de Chartres, du Journal de Brou, du Progrès, parus à l’aube du XXe siècle, se dévoilent les faits divers de notre petit village complétant les délibérations du conseil municipal que nous vous proposons.
On pouvait y lire, l’encre de la presse typographique à peine sèche, des entrefilets guettés chaque semaine, échos des petites histoires en embuscade de la grande. Parfois d’insignifiants potins et de vilains ragots, à croire que les conversations ont toujours besoin de s’émoustiller de petits riens, véritable poil à gratter de la bienséance, insatiable quête du « qu’en dira-t-on » qui défie le temps…. mais aussi des articles de la presse locale mettant en lumière des Émanoises, des Émanois, qui, par leurs actes de dévouement ou de bravoure, méritaient en leur temps d’être connus bien au-delà des limites de notre modeste village et qui auraient pu être passés sous silence.
À mon tour de me faire l’écho de ses potins glanés au fil de mes lectures de la presse locale. (Les passages en italique sont la retranscription exacte des articles des journaux pré-cités.)
Avril 1901
Depuis la mort de Mme Fauquet, de la Taillanderie, commune de Saint-Éman, survenue le 27 mars dernier, sa maison d’habitation était restée inoccupée.
M. Fauquet fils, cultivateur, unique héritier, qui demeure en face de ladite maison, se contentait d’aller la visiter de temps en temps.
Or, samedi dernier, M. Fauquet fut fort surpris de constater que pendant la dernière nuit un malfaiteur s’était introduit dans l’habitation de sa mère en pratiquant un trou dans la toiture en chaume, puis un autre dans le plafond au-dessus de la chambre à coucher.
A l’intérieur, tous les meubles avaient été fouillés et le linge répandu sur le plancher. Le voleur s’était retiré en emportant divers objets de vêture estimés à 15 fr.
M. Fauquet n’a pas de soupçons sur l’auteur de ce vol.
Octobre 1901
À l’inauguration du Monument des Enfants d’Eure-et-Loir le dimanche 27 octobre, place Châtelet, à Chartres, honorant les gardes nationaux et mobiles du département morts pour la patrie pendant la guerre de 1870, M. de Goussencourt de Saint-Éman, ancien officier de la Garde mobile, figurait parmi les personnalités présentes entourant M. Joseph Caillaux, ministre des Finances, représentant M. Emile Loubet, président de la République, et M. Georges Fessard, maire de Chartres. Une foule de 15 000 personnes assistait à la cérémonie.
Avril 1902
Élections législatives, les conférences de M. de Saint-Pol : À Saint-Éman, monsieur le maire préside. M. de Saint-Pol tient sous le charme de sa parole, de son langage spécial de cultivateur, la totalité des électeurs de cette petite commune réunis à la mairie. --->
Avril 1903
Le mardi 31 mars 1903, se déroulent à Villebon les obsèques de M. le Marquis Pontoi Pontcarré, ancien député, maire de Villebon et propriétaire du château de Villebon. Parmi l’assistance, le journal cite « au hasard du crayon » les noms de MM. Des Forts de Nonvilliers, vicomte de Goussencourt de Saint-Éman, …
Février 1904
Sur la commune de Saint-Éman, environ 18.000 bouleaux de semis, âgés de 1 à 2 ans, ont été arrachés dans un plant au lieu-dit le Bois-Brûlé (il s’agit des parcelles boisées situées face à la ferme du Grand-Bois-Barreau) et appartenant à M. Jacques Feugères des Forts, propriétaire à Nonvilliers-Grandhoux. Celui-ci qui estime sa perte à 200 francs a porté plainte.
L’enquête a établi que le plant de bouleau a été arraché par M. Frédéric Debon, journalier à Illiers.
Ce dernier, interrogé, a reconnu avoir arraché du plant de bouleau, mais il l’a fait, a-t-il dit, sur l’ordre de M. Colas, garde particulier de M. Chapet.
M. Colas, interrogé à son tour, prétend avoir bien donné l’ordre à Debon d’arracher du plant de bouleau, mais sur la propriété de son patron et non sur celle de M. Feugères des Forts.
Juillet 1904
Lors de sa candidature aux élections au Conseil Général, M. d’Aymery, maire d’Illiers, rappelait qu’ « Il y aurait lieu de faire aboutir le projet de tramway de La Loupe à Bonneval par Illiers en passant par Saint-Eliph, Champrond, Nonvilliers-Grand-Houx, Les Châtelliers-Notre-Dame et Saint-Éman, puis celui de Châteauneuf à Illiers par Courville et desservant Fruncé, Cernay, Marchéville, Les Châtelliers-Notre-Dame et Saint-Éman ».
Novembre 1904
Destruction des mulots : (M. de Goussencourt, maire de Saint-Éman, était convié à une réunion comme tous les maires du canton d’Illiers) Une réunion aura lieu à la mairie d’Illiers aujourd’hui vendredi 4 novembre, à 3 heures.
A cette occasion, M. le Préfet se rendra à Illiers dans le but d’établir une entente entre MM. Les Maires et les principaux cultivateurs du canton pour arriver à la destruction aussi rapide et complète que possible des mulots. Il invite MM. les cultivateurs à assister à cette réunion.
M. Garola, professeur départemental d’agriculture, sera également présent et fournira tous les renseignements qui pourront être demandés.
Avril 1906
Chronique électorale de la 2e circonscription, les conférences de M. de Saint-Pol :
Vendredi 20 avril. Toutes les journées que M. de Saint-Pol vient de passer avec ses électeurs ont été bonnes et, partout, le vaillant député de la 2e circonscription ne peut qu’être flatté et touché de l’accueil dont il est l’objet, mais celle d’aujourd’hui comptera certainement parmi les meilleures.
Aujourd’hui, à Saint-Éman, charmante localité située dans une riante vallée, aux sources du Loir, un accueil chaleureux a été fait à M. de Saint-Pol, qui a développé son programme au milieu de l’attention générale, et, après la conférence, la causerie s’est continuée dans la plus grande cordialité.
Un vieux criméen est venu entretenir M. de Saint-Pol de son oncle, le général Jules de Saint-Pol, tué au combat à Sébastopol en septembre 1855, sous les ordres duquel il avait servi. Et ce fut une occasion excellente pour parler de la patrie.
M. de Goussencourt, maire de Saint-Éman, présidait le bureau, assisté de MM. Fouquet, adjoint et Sotteau, conseiller municipal.
Septembre 1907
Octobre 1907
Avril 1908
Décembre 1908
Mai 1909
Juin 1909
Juillet 1909
Décembre 1909
Janvier 1910
Mariage : Récemment a été célébré le mariage de M. Henri de Goussencourt fils de M. le comte et Mme la comtesse de Goussencourt, au château de Saint-Éman, avec Mlle Gabrielle Hüe, de Pontoise.
Nous adressons tous nos vœux aux jeunes époux, et à Mme la marquise de Vernely, à M. le comte et Mme la comtesse de Goussencourt ainsi qu’à Mme Fenand Hüe, l’hommage de nos respectueuses félicitations.
Mort accidentelle : Il y a quelques jours, voulant fixer sur un arbre un moulin à vent en miniature de son invention, Germain Coconnier, domestique à la ferme des Pâtis, âgé de 44 ans, manqua du pied, comme on dit vulgairement, et fit une chute violente sur le sol.
Une fracture du crâne entraîna la mort. M. le docteur Bariéty, d’Illiers, a fait les constatations.
Sauvetage : Samedi dernier, vers 3 heures du soir, la fille aînée de M. Plateau, cultivateur au Petit Bois Barreau, allait avec sa petite sœur, âgée de 4 ans, laver du linge à la mare de M. Sotteau, sur la route d’Illiers à Champrond.
Pendant qu’elle était à sa besogne, la petite qui jouait sur le bord de la mare, glissa tout à coup et disparut dans l’eau profonde d’un mètre cinquante.
Sa sœur appela aussitôt au secours et parvint à se faire entendre de MM. Sotteau père et fils qui accoururent et avec une perche et un crochet purent retirer l’enfant.
M. le docteur Deniau, d’Illiers, qui passait à ce moment sur la route lui donna des soins et la fillette fut vite remise. Sans la prompte intervention de MM. Sotteau, à qui nous adressons nos bien sincères compliments, la pauvre petite se serait infailliblement noyée.
Au collet : Le féminisme gagne du terrain ; voilà que les femmes se mettent à faire du braconnage.
Le garde du bois de Saint-Éman a surpris en effet, la femme Pichot, de la ferme des Petites-Vallées, au moment où elle décrochait un lapin pris dans un collet.
Le feu dans les bois : Mercredi, le feu s’est déclaré, prés du chemin dit du Maréchal, en des bois appartenant à M. le comte de Goussencourt.
Trente ares de taillis de chêne ont été détruits.
Le feu, dont la cause n’est pas déterminée, paraît avoir pris naissance au bord du chemin sus-indiqué.
Le lendemain, un incendie éclatait de nouveau en des bois-taillis appartenant à M. des Forts.
Prises au collet : Curieuse et coquette, une poule blanche a voulu, trouvant un collet dans les bois de Saint-Éman, l’essayer et s’y est trouvée prise.
La femme Pichot, ayant décroché la dite poule qu’elle destinait sans doute au pot familial, a été prise à son tour au collet par le garde Gaubert au service de M. de Goussencourt.
La délinquante s’est livrée à des voies de fait sur le garde. Nous la retrouverons prochainement en justice.
À l’audience du tribunal correctionnel de Chartres le mardi 6 juillet :
Tel est pris qui croyait prendre. Chasseresse comme Diane, la dame Pichot a été aperçue par le garde Gaubert, au service de M. de Goussencourt à Saint-Éman, au moment où elle décrochait une poule prise dans un collet.
La Ligue Protectrice des Animaux n’aurait pas manqué de lui décerner un diplôme d’honneur pour cet acte de sauvetage.
Le Tribunal lui accorde huit jours de cage.
Il est bon de mentionner que la prévenue avait aggravé son cas, déjà des plus sérieux, en usant vis-à-vis du garde d’expressions un peu libres.
Carnet de mariage : Nous sommes heureux d’apprendre les fiançailles de Mlle Elisabeth de Goussencourt, fille de M. de Goussencourt, le distingué maire de Saint-Éman, avec M. Henri de Varax. Toutes nos félicitations et nos vœux.
Disparition : Mme veuve Truquet, cultivatrice aux Lubineries, faisant l’appel de ses poulets à leur retour des champs, s’est aperçue qu’il en manquait onze.
Une enquête ouverte aussitôt a déjà donné des indications précieuses sur le chemin que les déserteurs ont dû prendre.
Inondations : A la suite des pluies torrentielles qui ont fait grossir considérablement les cours d’eau, le Loir a subi une crue comme on n’en avait pas vu depuis près de vingt ans ; les plaines sont inondées, les habitations menacées, certaines évacuées. En aval de Saint-Éman, du côté de Bonneval et de Châteaudun la crue a atteint près de 1m80 au dessus du niveau habituel. Le Loir a débordé dans toute la région grossi entre autres par les eaux de l’Ozanne.
Le Loir déborde et en ce mois de janvier 1910 revient aussi à notre mémoire la terrible crue de la Seine, à Paris, qualifiée de crue centennale. Débordement le plus important depuis celui de 1658. Le zouave du pont de l’Alma a de l’eau jusqu’aux épaules. Le réseau métropolitain est inondé et les députés se rendent à l’Assemblée nationale en barque.
Février 1910
Carnet de mariage : Le mercredi 26 janvier a été célébré dans l’église de Saint-Éman, gracieusement ornée de plantes vertes, le mariage de Mlle Elisabeth de Goussencourt avec M. Henri de Varax.
La bénédiction nuptiale a été donnée aux jeunes fiancés par M. le Doyen d’Illiers et la messe dite par le desservant de la commune.
L’orgue était tenu avec talent par Mlle Bara, d’Illiers.
La quête a été faite par M. le vicomte de Goussencourt, lieutenant au 20e chasseurs, avec Mlle d’Avoust et M. le vicomte Raoul de Varax avec Mlle Anne-Marie de Goussencourt.
Remarqué dans l’assistance distinguée :
Marquis de Vernehy, baronne Hue, M. et Mme des Forts, vicomte Ernest et Henri de Sarret, comte et comtesse d’Armancourt et leurs filles, comtesse Hermand, comte et comtesse Pierre Hermand, comtesse de Rougemont, marquis et marquise de Maupeou et leur fille, comte et comtesse Dulong de Rosnay, M.Joseph Dulong de Rosnay, baron et baronne Henri de Goussencourt, Mme Villette et ses filles, Mlle d’Yerville, MM. Pellerin, Mercier, M. et Mme Félix Mercier, M. Le Carbonier de la Morsanglière, M. Jacques de Varax, et M. et Mme Etienne de Varax, vicomte et vicomtesse de Varax, vicomte Joseph, Pierre et Raoul de Varax, comte de La Salle, M. de Verneuil, etc...
La comtesse de Goussencourt a reçu ses invités après la cérémonie.
À tous les vœux et compliments qui ont été offerts, à l’occasion de cette cérémonie charmante, aux nouveaux époux et à leurs familles nous sommes heureux d’ajouter l’expression respectueuse des nôtres.
Février 1910
-Audience du tribunal correctionnel de Chartres, 1er février 1910 :
Les dieux s’en vont.
Sur les hauteurs de Cynthe ou aux bords de l’Eurotas, escortée de ses nymphes intrépides, Diane s’amusait jadis à « courre » le troupeau fuyant des gazelles et elle ne se servait, sans réclame, que des seules flèches d’or de la maison Vulcain (magasins généraux sous l’Etna, succursale aux îles Lipari, téléphone, on porte à domicile).
Aujourd’hui, son carquois vide, ses flèches brisées, elle s’embusque au matin-jour, sous la feuillée, et offre à l’imprudent lapin qui passe ses colliers de simple fil de laiton.
C’est au moment où elle accomplissait ce geste et ce rite, sous le pseudonyme de la dame Pichot, que le garde de M. de Goussencourt, à Saint-Éman, déclare l’avoir surprise dans les bois confiés à sa vigilance.
La dame Pichot invoque cependant un alibi et, bien que les déclarations du garde soient formelles, Thémis est indulgente à Diane qu’elle relaxe sans dépens.
Entre déesses…
Avril 1910
-Chroniques électorales : Les conférences de M. de Saint-Pol.
À Saint-Éman, à 9h, nous sommes reçus par M. de Goussencourt, maire, qui préside le bureau, assisté de MM. Fauquet, adjoint, et Brienne, conseiller municipal.
La presque totalité des électeurs est venue assister à la conférence dans la salle de la mairie. Auparavant, on cause du temps, des travaux en cours, de l’état des récoltes futures. M. de Saint-Pol passe en revue les principaux points de son programme ; il parle du repos hebdomadaire. Un électeur, tuilier de profession, (Il s’agit de M. Allain) expose qu’il est fort gêné dans l’exercice de son industrie par les lois du travail ; constamment, il doit subir de brutales contraventions, il ne peut plus ainsi continuer son métier.
Le député répond que les lois du repos hebdomadaire et de limitation des heures de travail, bonnes dans leurs principes, doivent être révisées pour en obtenir une juste et utile application excluant toute vexation.
Édition du
10 avril 1910
Au scrutin des Législatives du 24 avril 1910 , M. de Saint-Pol perd les élections au bénéfice de M. Maurice Maunoury, il est battu pour la première fois après plusieurs mandatures successives. Au bureau de vote de Saint-Éman, sur 26 votants pour 29 inscrits, M. de Saint-Pol a obtenu 11 voix contre 15 pour son adversaire.
Voleur irascible : Il y a quelques jours, M. Allain, tuilier à Saint-Éman, occupé à son travail, apercevait un individu qui descendait avec précautions dans un trou de terre à briques, s’emparait d’une pioche et s’éloignait rapidement.
Il envoya son domestique le questionner, mais le voleur, abandonnant la pioche, se mit à courir sur le pauvre garçon en le criblant de pierres.
M. Allain s’interposa, mais l’irascible voleur, un nommé Victor Debon, le menaça de lui faire son affaire.
Plainte a été portée.
Juin 1910
Tribunal correctionnel de Chartres, audience du 14 juin 1910 :
Mme Pichot de Saint-Éman laissa paître ses vaches dans le pré d’autrui et accueillit par quelques mots bien sentis le garde Gaubert au service de M. de Goussencourt, qui verbalisait.
Seize francs d’amende.
Septembre 1910
- Jeune incendiaire : M. Crépeau, cultivateur aux Brûlons, commune d’Illiers, travaillait , samedi dernier, vers 7h et demie, au lieu-dit les Dauffrais, lorsqu’il vit des flammes s’élever au-dessus de ses champs. Il s’approcha et constata qu’une moyette de dix gerbes flambait.
Il put heureusement préserver les tas voisins de l’incendie.
Les gendarmes informés ouvrirent une enquête et apprirent qu’un enfant, le jeune Ratier, 7 ans, demeurant à Saint-Éman, se trouvait seul à proximité des tas de gerbes au moment précis où jaillirent les flammes.
Ils interrogèrent le jeune Ratier qui, après avoir nié, reconnut être l’auteur de l’incendie.
Il revenait des Dauffrais porteur d’une boîte d’allumettes que sa mère l’avait chargé d’acheter lorsque l’idée lui vint de mettre le feu à la récolte.
Il alluma une allumette, la jeta sur l’un des tas et s’enfuit.
Les parents civilement responsables, seront poursuivis.
-Audience du Tribunal correctionnel de Chartres le 25 octobre 1910 :
Le jeune Ratier, 7 ans, habitant chez ses parents à Saint-Éman, eut l’imprudence d’enflammer des allumettes à proximité d’une petite meule de paille appartenant à M. Crespeau, laquelle fut détruite.
Le tribunal prononce l’acquittement.
Janvier 1911
Morte dans un champ : Lundi dernier, vers 5 heures du soir, M. Bazin, demeurant à Illiers, revenait de son travail lorsqu’en passant au lieu-dit la Grande-Barre, il aperçut dans un fossé qui borde la route une femme en état d’ivresse. Il l’aida à sortir du fossé, puis pensant qu’elle saurait retrouver seule le chemin de son logis, il s’éloigna.
A quelque distance de là il rencontre M. Denis à qui il raconta son aventure. Ils revinrent tous deux à la Grande-Barre et M. Denis reconnut la femme qui s’était couchée dans un champ. Il se chargea de prévenir son mari, M. C…, habitant Saint-Éman.
Le lendemain, lorsque M. Bazin repassa, la femme était toujours là. Il s’approcha et constata bientôt qu’elle était morte.
Un médecin qui a examiné le cadavre a conclu à une mort naturelle due à une congestion.
Février 1911
Résultat des élections- Mandat forcé : MM. Percheron, Fauquet, Courteil et Grégoire, qui avaient donné leur démission (NDLR : du conseil municipal présidé par le Comte Edgar de Gousssencourt) d’une façon retentissante , il y a deux mois, viennent d’être élus conseillers.
Une liste imprimée (on se met bien à Saint-Éman!), portant les noms des quatre démissionnaires, a été distribuée au quarteron d’électeurs de la commune. Ceci nous montre combien ces messieurs craignaient de ne pas voir renouveler leur mandat.
Gageons cependant qu’avant peu, nos élus adresseront à nouveau leur démission, espérant ainsi déterminer M. le Préfet à dissoudre le Conseil tout entier.
Après l’élection, on a sablé le champagne et rédigé l’ordre du jour suivant, dont nous ne garantissons pas l’authenticité.
Un poète de circonstance l’a rédigé en vers et, avec un orchestre improvisé, élus et électeurs l’ont chanté avec entrain. Les échos nous en sont parvenus jusqu’ici. En voici quelques couplets :
Tara raboum ça y est,
L’Conseil est au complet,
Les quat’ « démissionnés »
Sont « réélus » conseillers,
Mais c’est pas pour longtemps.
Parcourez simplement
Le p’tit billet suivants
Rédigé en trinquant :
« S’iou plaît, Mossieu l’Préfet,
Voulez-vous r’accepter
De not’ réélection
La nouvel’ démission.
Par la même occasion,
Pour tuer la Réaction (*),
Vous pourriez sans raison
Fair’ la dissolution.
Et alors nous nomm’rons
Dix conseillers lurons
Qui administreront
Autrement qu’en « bouffons ».
………………………..
Fauquet, Courteil, Perch’ron
Et Grégoire, nom de nom,
Somm’s las d’être les « bouffons »
De tout’ la Réaction (*).
Si l’on se moq’ de vous
D’voir que vous êtes pour nous,
Vous s’rez récompensés
D’avoir fait not’ succès.
Bonsoir, Monsieur l’Préfet,
Nous allons nous coucher ;
D’ vous dépend qu’il y ait
Dix nouveaux conseillers.
Signé :Pince-sans-Rire.
NDLR : la première ligne de ce texte "Tara raboum ça y est" nous a inévitablement rappelé cette chanson "Tha-ma-ra-boum-di-hé" (Chanson de Henri J. Sayers, compositeur canadien, dont les paroles ont été adaptées en français par Fabrice Lémon, et musique "rapportée d'Amérique".)
Puis ce titre, qui fut chanté à l'origine aux USA, fut repris à Londres par Lottie Collins en 1892 sous le titre..."Ta-ra-ra Boom-de-ay" !!!
Sans trop vouloir s'engager sur une vérité absolue, nous avons de bonnes raisons de penser qu'en 1911, le "poète improvisé" de Saint-Éman permit à l'assemblée de reprendre cette mélodie qui devait être très populaire à l'époque, et dont vous pourrez écouter ici une version (avec un titre comme souvent légèrement modifié), jouée par Charles Verstraete et son orchestre !
Une manière comme une autre de "redonner un peu de vie" à cette réunion datant de plus d'un siècle...
(*) NDLR : Le terme Réaction évoqué ci-dessus serait apparu au cours de la Révolution française de 1789, pour qualifier le mouvement politique (et visant tout particulièrement, en ces circonstances, le Comte de Goussencourt) s’opposant aux changements engagés par les révolutionnaires, et voulant revenir à l’Ancien Régime. Le partisan de la Réaction est nommé « réactionnaire ».
Août 1911
Deux ivrognes : Dimanche dernier, deux individus à moitié ivres qui passaient sur la route, insultèrent deux femmes qui travaillaient dans un champ.
L’honorable maire, M. de Goussencourt, intervenant pour faire cesser la scène, les deux hommes l’insultèrent grossièrement.
Les gendarmes prévenus se mirent à la poursuite des individus et les arrêtèrent à Illiers ; ce sont les nommés Guillin et Boullay, le premier habitant Montigny-le-Chartif et le second Frazé.
Octobre 1911
Audience du Tribunal correctionnel de Chartres sous la présidence de M. Barjot : Quinze jours de prison à la femme Bigot, de Saint-Éman, pour chasse avec engins prohibés.
Mars 1912
Contraintes par corps : Un journalier a été arrêté ces jours derniers en vertu de contraintes par corps par les gendarmes d’Illiers. C’est le dénommé Debon Victor, 38 ans, habitant Saint-Éman.
Mai 1912
En février 1911, le Journal de Chartres s’était déjà fait l’écho des discordes qui régnaient au sein du conseil municipal de Saint-Éman avec, il faut le noter, une certaine ironie rédactionnelle qui fait montre d’un manque évident d’impartialité dans ce conflit… Après le naufrage du Titanic le mois précédent, en avril 1912, l’échéance électorale locale du 5 mai annonçait le sabordage de l’équipe municipale qui avait eu pour « capitaine » le Comte Edgar de Goussencourt qui pendant plus de 40 ans a mené sa barque contre vents et marées. Le scrutin allait donner la victoire à l’instituteur, M. Gouabault. C’est par presse interposée que les ayants cause règlent leurs différends avec moult sous-entendus, loin d’un inoffensif duel à fleurets mouchetés. Nous vous proposons d’en être les témoins en lisant ci-après le détail des articles publiés :
- Parution du vendredi 10 mai :
L’art d’être conseiller municipal – On nous écrit :
L’importante commune de Saint-Éman, 104 habitants, procédait dimanche dernier au renouvellement du Conseil municipal.
Sur 45 électeurs inscrits 25 habitent les lieux ; les autres viennent de Paris, Chatou, Fontaine-la-Guyon, Illiers et autres lieux.
Ces derniers, propriétaires chacun d’un are de terrain, ont élu domicile électoral dans la joyeuse cité qui commande les sources du Loir !
Une personne aussi intelligente que distinguée (!), en faveur de laquelle nous proposons les palmes, vient de réaliser le tour de force suivant :
D’une propriété de 25 ares dont elle venait de faire l’acquisition, elle a fait 24 parts, et en a bombardé propriétaires 24 étrangers de ses amis. Avec une mathématique qui ne surprendra personne, une liste de 10 noms, où figure naturellement en tête le héros de cette épopée politique, est sortie victorieuse de l’urne : A chacun 25 voix ! Et voilà ces messieurs, en plus d’un are de terrain propriétaires de l’Hôtel de Ville !
Voilà le moyen de devenir conseiller municipal et résolu clairement le problème de faire la loi aux habitants de sa commune avec 24 minuscules propriétaires étrangers à la localité.
A noter que l’auteur de cette trouvaille a exigé des électeurs « suspects » de voter à bulletin déplié, à laquelle injonction l’un d’eux s’est refusé et a préféré ne pas voter.
Signalons un bulletin annexé au procès-verbal qui mieux que tout fera ressortir la moralité de cette élection et dont voici le texte : « N’ayant aucun intérêt à défendre sur la commune de Saint-Éman et propriétaire d’un are que je n’ai jamais payé, je ne vote pour personne. » Fiez vous donc aux amis ! Et vous, propriétaires réels et lecteurs, concluez…
Un électeur de Saint-Éman.
- Parution du jeudi 16 mai :
A propos des élections : En réponse à l’article, relatif aux élections dans la commune de Saint-Éman, qui a paru ici sous le titre « L’art d’être conseiller municipal », M. Gouabault, qui se déclare visé, nous adresse la lettre suivante, d’où, en vertu de la même loi qu’il invoque, nous sommes autorisés à retrancher certains passages visant des tiers, que nous n’avons pas à mettre en cause, ou contenant à l’égard de certains autres des expressions un peu vives.
« Depuis le mois d’août 1910, nous écrit M. Gouabault, le Conseil municipal a fonctionné avec six conseillers seulement, les quatre autres ayant refusé et refusant encore de siéger avec le maire.
« Parmi ces six conseillers, quatre sont fermiers ou ouvriers du maire ; un seul est indépendant, quoique étant fermier aussi d’un châtelain du voisinage…
« A la réunion des répartiteurs en mars 1912, un seul répartiteur s’est présenté à la mairie, quoique le maire eut convoqué tous les intéressés, titulaires et suppléants, et cet unique répartiteur est un ouvrier de M. le maire.
« Dans ces conditions la commission pouvait-elle délibérer valablement ?
« Au sujet des élections municipales du 5 mai dernier, le maire essayant de former une liste ne peut parvenir à y faire figurer dix noms. Voyant cela il s’abstient de venir voter.
« Il faut donc que Saint-Éman soit sans municipalité. Nous avons facilement trouvé nos dix conseillers, dont cinq sont propriétaires fonciers et quatre fermiers ou locataires, habitant la commune. Si M. le maire impose une liste à ses domestiques, ouvriers et fermiers nous avons bien le droit de faire inscrire cinq ou six de nos parents et ceux-ci ont bien le droit de venir voter ici…
« Si un électeur a refusé de voter c’est que le coup était prémédité d’avance, plusieurs électeurs ayant des bulletins de vote de 20 à 25 centimètres de long…
« Moralité : L’union fait la force.
« Si réellement votre correspondant habitait la commune de Saint-Éman, voilà les renseignements qu’il aurait pu vous fournir.
« Étant attaqué, j’attends la réponse à laquelle j’ai droit.
« Recevez, Monsieur le Directeur, mes civilités empressées.
F. Gouabault
- Parution du dimanche 26 mai : (suite et fin)
Écho des élections : A la réponse de M. Gouabault, M. le comte de Goussencourt réplique par la lettre suivante qu’il nous prie d’insérer :
« Le Conseil, depuis environ quinze mois, a toujours fonctionné avec six membres, les quatre autres ne voulant pas se présenter malgré les convocations qui leur ont toujours été envoyées.
« Les réunions ont été régulièrement faites, les affaires de la commune ont marché comme auparavant et toutes les délibérations ont été approuvées par la préfecture.
« Aux dernières élections, ayant été nommés pour quatre ans, nous avons tenus tous les six à remplir notre mandat jusqu’au bout et nous y sommes arrivés.
« Nos adversaires ont cependant fait beaucoup de voyages à Chartres pour essayer de me faire casser et dissoudre le Conseil, mais ils n’ont pu y parvenir, car nous avons toujours marché d’après la loi.
« Cette année, devant un nombre considérable d’électeurs nouveaux inscrits, mais n’habitant pas la commune, nous avons trouvé bon de nous retirer et de ne pas faire de liste, car cela nous aurait été facile de trouver dix noms dans la commune, aussi honorables que ceux de nos adversaires.
« Pour un clérical et un conservateur, j’ai rempli les fonctions de maire depuis le mois de mai 1871 et les maires en fonction depuis 41 ans ne doivent pas être nombreux, et j’en remercie tous les anciens électeurs de la commune qui me sont restés attachés. J’ai, à la mairie, comme successeur, un homme aussi intelligent et aussi distingué que possible, dit-on M. Ferdinand Gouabault, que M. l’Inspecteur d’académie n’a pas cru pouvoir laisser à la tête de l’école de la commune, au mois d’août 1910. Pourquoi ? »
M. le comte de Goussencourt
Juin 1912
Vol de lapin : Mme veuve Jardin, cultivatrice à Saint-Éman, s’aperçut mercredi qu’une lapine avait disparu de son clapier.
Elle déposa aussitôt une plainte.
Octobre 1912
Arrestation : La femme Mauté, 38 ans, journalière à Saint-Éman, en villégiature en France malgré une interdiction de séjour, a été arrêtée mardi par les gendarmes d’Illiers.
Novembre 1912
- Vol : Ces jours derniers, les ouvriers de M. Jules Lenfant, charpentier à Illiers, déposèrent une pince dans le cimetière où ils travaillaient.
Or, celle-ci ayant disparu, les ouvriers ont porté plainte.
Préjudice : 8 francs ; auteur inconnu.
- Vol : M. Victor Debon, journalier à Illiers, avait quitté le 1er septembre le local qu’il occupait à Saint-Éman et y avait laissé, divers outils, des vêtements et son mobilier.
Dimanche dernier, étant allé à Saint-Éman, il s’est aperçu que plusieurs de ces objets avaient disparu.
Il a déposé une plainte.
Juin 1913
Aujourd’hui, il peut paraître incongru pour une banque d’afficher dans la presse locale les opérations de certains de ses clients. Cela l’est tout aussi pour les abonnés du journal qui pourraient, à titre personnel, faire les frais d’une telle indiscrétion. Ce fut pourtant le cas de la Caisse d’Épargne qui, pleine page, et pour chacune de ses succursales, dresse la liste de ses clients dont les dépôts n’ont pas été activés depuis trente ans tombant d’office sous le coup d’une prescription au bénéfice de la banque.
Ainsi apprenons-nous que :
De Goussencourt Marie-Louis-Gaston né le 7 janvier 1875 à Saint-Éman,
De Goussencourt Marie-Renée-Louise née le 7 avril 1876 à Saint-Éman,
De Goussencourt Emmanuel-Marie né le 15 avril 1877 à Saint-Éman,
mineurs sous l’administration légale de De Goussencourt Edgar-Louis-Antoine, leur père.
disposaient chacun, chacune d’une épargne versée à leur naissance sur un compte qui n’était plus activé depuis longtemps…
Avril 1914
À l’approche des élections législatives, le candidat M. de Saint-Pol fait sa tournée de conférences qui passera par Saint-Éman :
Après s’être arrêté à Méréglise, M. de Saint-Pol confère à Saint-Éman, en présence d’une quinzaine de citoyens. La réunion est présidée par M. Gouabault, maire. M. Choquet Pierre est désigné comme assesseur.
Là encore, le sympathique candidat expose les grandes lignes de son programme ; on l’écoute avec beaucoup d’attention.
Mai 1914
A qui le fusil ? : Lundi dernier, en effectuant une tournée dans les bois de Saint-Éman, M. Mercier, garde au service de M. Jacques des Forts, propriétaire à Nonvilliers-Grandhoux, a trouvé trois ballots appartenant à des trimardeurs. Dans l’un deux, il a découvert un fusil à broche qu’il s’est empressé de déposer à la gendarmerie.
Juin 1914
Acte stupide : M. Alexandre Ballay, jardinier, au service de M. le Comte de Goussencourt, propriétaire du château des Pâtis, a constaté, mardi matin, qu’un bassin contenant 60 mètres cubes d’eau avait été vidé au cours de la nuit.
Sur la plainte de M. de Goussencourt, la gendarmerie a ouvert une enquête.
Février 1915
La quête faite par Melle Hallouin, pour la Journée du 75, a produit la somme de 48 fr qui a été versée à la préfecture par le maire de Saint-Éman.
La journée du 75 du 7 février 1915 a été organisée par le Touring Club de France. Devant le succès de la quête organisée au profit du poilu, cette action fut prolongée pendant toute l’année 1915, avec une vente de médailles et insignes qui rapportèrent 5 266 182 francs de l’époque à la date du 10 juin 1915.
Une médaille en métal, représentant un canon de 75, marquée « Journée du 75 » et « 1914 1915 », avec entre les deux dates le sigle T.C.F, est vendue lors de ces campagnes de collecte de fonds.
Juillet 1915
Croix de guerre et citation à Saint-Éman : Nous apprenons avec plaisir que M. de Goussencourt Marie-Louis-Gaston, capitaine commandant le 11e escadron du 6e régiment de chasseurs, vient de recevoir la Croix de guerre et a été cité à l’ordre de la brigade pour le motif suivant :
« Chargé avec six pelotons de réservistes et de chevaux requis, à peine formés, d’éclairer la défense du camp retranché de Lille, à partir du 21 août, organisa remarquablement son service de sûreté et de découverte. Son escadron eut plusieurs affaires de détail dans lesquelles il se distingua et fit prisonniers deux officiers, huit cuirassiers et dragons ennemis et treize chevaux.
« Le 24, l’escadron chargea des partis ennemis qui barraient la route de Templeuve pour ouvrir le chemin à ses reconnaissances sur Templeuve et Marquin.
« Dans la nuit du 24 au 25 août, au moment de l’évacuation de Lille, il fit spontanément ce jour-là et les jours suivants, jusqu’au 29 août, l’arrière-garde de la colonne des dépôts d’infanterie réunis à Lille (16 à 17 000 hommes).
« Le 28 août, par son sang-froid, il évita des collisions et des coups de feu entre les postes de sa colonne et les éléments en retraite de Bapaume et d’Havrincourt pris pour des ennemis.
« A montré dans toute cette période beaucoup de courage, de talent, de caractère et de présence d’esprit.
M. le capitaine de Goussencourt est le fils de M. le Comte de Goussencourt, ancien maire de Saint-Éman.
Nous adressons à M. le capitaine de Goussencourt et à sa famille nos bien sincères félicitations.
Septembre 1916
Citation à l’ordre à Saint-Éman : Le colonel commandant l’artillerie lourde du 11e corps cite à l’ordre du jour le brigadier téléphoniste de Goussencourt Marie-Antoine-Joseph du 106e régiment d’artillerie, 22e batterie :
« A fait preuve pendant les combats du 1er au 6 août 1916, d’une bravoure et d’un sang-froid remarquables en assurant sous les bombardements les plus violents la réparation des lignes téléphoniques fréquemment coupées.
« Le 5 août, a contribué volontairement à l’extinction d’un incendie provoqué par un obus de gros calibre.»
Le brigadier de Goussencourt est le plus jeune fils de M. le Comte de Goussencourt, propriétaire du château des Pâtis, commune de Saint-Éman ; il s’était engagé volontairement au mois de janvier 1914 au 26e régiment d’artillerie à Chartres, à l’âge de 18 ans.
Nous adressons au brave brigadier nos compliments les plus sincères.
Février 1917
Le Journal de Chartres, dans son numéro du 11 février, fait paraître un article au sujet du village voisin de Nonvilliers-Grandhoux, titré Au loup !
« Les loups ont fait leur apparition dans nos contées. Sans erreur possible deux d’entre eux ont été vus par un chasseur ».
Le 14 février, on peut y lire :
« Comme suite à l’article que vous avez inséré dans le journal du 11 février, sous la rubrique:Nonvilliers-Grand-Houx : Au loup, vous pouvez ajouter :
« Samedi 3 février et lundi 5, vers 9 heures du soir, plusieurs personnes qui venaient de terminer une veillée et rentraient chez elles, ont aperçu ces animaux et les ont vus à cinquante mètres, marchant majestueusement dans le bourg de Saint-Éman, en face la maison d’école.
« Il n’y a pas d’erreur possible, des battues s’imposent sur les communes d’Illiers, Saint-Éman, Les Châtelliers et Nonvilliers. »
Juillet 1917
Citation et croix de guerre à Saint-Éman :
« Le lieutenant colonel commandant le 324e cite à l’ordre du régiment le soldat Allain Simon :
« Brancardier-musicien courageux et dévoué, n’a pas craint de traverser à toute heure de jour et de nuit des tirs de barrage d’une extrême violence pour se porter au secours des blessés qu’il a réussi à évacuer dans des conditions souvent très difficiles. »
Nous adressons nos compliments les plus sincères au brave soldat.
Août 1917
- Saint-Éman : Légion d’honneur.
Nous relevons au Journal officiel la nomination au grade de chevalier de la Légion d’honneur de M. le capitaine de Goussencourt Marie-Louis-Gaston, capitaine (active) au 6e régiment de chasseurs.
« Excellent officier, zélé et dévoué : A fait preuve dans le service aux tranchées de sang-froid et de bravoure. Une citation. »
Nous adressons à M. le capitaine de Goussencourt nos bien vives et bien sincères félicitations.
- Dans son édition du 5 août, le Journal de Chartres rend compte de l’initiative de l’association Saint-Jacques d’Illiers qui avait associé à la solennité de sa fête patronale la mémoire des soldats morts pour la patrie. On peut y lire que la présidence d’honneur de la cérémonie avait été dévolue à M. le capitaine de Goussencourt de Saint-Éman entouré notamment de M. le marquis de Maupéou, M. Alaphilippe, président de la section des Vétérans, M. Delafoy, directeur du centre d’instruction physique et militaire d’Illiers,…
Au cours de l’office religieux, a été évoqué le souvenir du directeur de l’association Saint-Jacques le vaillant officier qu’est M. l’abbé Loiseau, aujourd’hui prisonnier de guerre à Karlsruhe.
Juin 1918
Dans sa parution du 12 juin, le journal Le Progrès relate la cérémonie grandiose qui s’est déroulée au théâtre de Chartres en hommage aux « femmes de l’arrière ». Dans son allocution, M. Lhopiteau, sénateur et président du Conseil Général, déclare :
« Considérant que depuis l’ouverture des hostilités, des veuves, femmes et filles de mobilisés ont continué l’exploitation de leurs fermes avec un dévouement admirable… il y aurait lieu de concrétiser d’une manière spéciale et durable le magnifique exemple donné par ces femmes de cœur en instituant une médaille et un diplôme qui constitueraient pour les intéressées un précieux témoignage, en même temps qu’ils créeraient la plus louable émulation. »
Parmi les personnes distinguées, on peut lire le nom de Mme Talbot-Brichon de Saint-Éman qui se voit décerner la médaille aux agricultrices.
Août 1918
Le préfet d’Eure-et-Loir adresse à tous les maires l’arrêté suivant :
- Tous les propriétaires de chevaux, juments, mulets, mules susceptibles d’être requis par les Armées sont tenus, dans chaque commune, de présenter ces animaux devant les commissions spéciales aux lieux, jours et heures fixés :
À Saint-Éman, la commission passera le 27 août à 14 h place de la mairie.
Septembre 1918
À l’audience du tribunal correctionnel de Chartres du 24 septembre :
- Complicité de désertion : La dame Mauté, 44 ans, originaire d’Alsace-Lorraine, actuellement réfugiée à Saint-Éman, est inculpée d’avoir facilité ou favorisé sciemment la désertion du soldat Jardin, gardien de P.G. (Prisonniers de Guerre) à Illiers.
2 mois de prison avec sursis.
Juillet 1919
À l ’audience du tribunal correctionnel de Chartres du 24 juin :
- C’est une idylle et voilà tout…
La dame Mauté, de Saint-Éman, ayant invité de façon fort civile, le sieur Bruno Yves, laboureur de son état, à venir casser la croûte chez elle à la fortune du pot, Bruno ne crut pas devoir se dérober à cette aimable invite.
La fête, exquise et fort bien ordonnée, se termina par une promenade sentimentale aux champs, et par une sieste à l’ombre d’un pommier.
Là, Bruno s’endormit et il eut tort, car, à son réveil, il constata, avec la disparition de son hôtesse, celle de sa montre et de son porte-monnaie.
Cette idylle, à la façon de Théocrite et de Virgile, se dénoue devant le tribunal qui, par défaut, condamne la femme Mauté, à 2 mois de prison.
Avril 1920
Dans le journal, le service des Routes nationales et Chemins vicinaux informe les lecteurs du passage du cylindre à vapeur au cours de la semaine du 18 au 25 avril 1920. Le rouleau compresseur sera le 24 à Saint-Éman pour la réfection du chemin n°352, des Petites Vallées.
Octobre 1920
Saint-Éman. Arrestation d’un incendiaire :
Dimanche dernier, vers 9 heures 45 du soir, un incendie s’est déclaré dans une maison inhabitée, appartenant à M. de Gastines, propriétaire et louée à M. Silly. Toute la partie supérieure de la maison, couverte en chaume, fut détruite par le feu. La gendarmerie ouvrit une enquête sur les causes du sinistre où la malveillance ne paraissait pas étrangère.
Un nommé Corbin Émilien, âgé de 20 ans, ancien locataire de cette maison, résidant actuellement aux Fauquetteries, fut interrogé et après s’être rétracté plusieurs fois finit par avouer qu’il était l’auteur de cet incendie. Les gendarmes procédèrent aussitôt à l’arrestation de cet incendiaire.
Janvier 1921
Cour d’assises d’Eure-et-Loir – 1re Session de 1921 – Audience du 17 janvier 1921 :
La première session des assises, au rôle de laquelle sont inscrites trois affaires, s’est ouverte, lundi à midi, sous la présidence de M. le conseiller Fleury, assisté de MM. Hourtoule et Cornu.
C’est dans la salle de la Cour d’assises, restaurée, que se sont déroulés les débats.
Affaire Corbin
Après les formalités d’usage, tirage au sort des jurés, etc, M. Nicolet, greffier, a donné lecture de l’acte d’accusation :
Corbin Emilien-Etienne-Célestin-Jacques, né le 30 juin 1900, à Illiers, journalier, demeurant à Saint-Éman, habitait avec sa mère, ses frères et sa sœur, une maison de Saint-Éman, appartenant à M. de Gastines, lorsque ce dernier ayant loué l’immeuble à M. Silly, tuilier, donna à bail à la famille Corbin une autre de ses maisons située dans la même commune, au hameau des Fauquetteries.
Mme Corbin mère paraît avoir été mécontente de quitter la maison de Saint-Éman et le jardin assez spacieux qui l’entourait.
Son fils Émilien en éprouva aussi un vif ressentiment contre le propriétaire et surtout contre le nouveau locataire, Silly, dont il croyait avoir à se plaindre à un autre point de vue.
C’est pour ces motifs que, le 3 octobre 1920, l’accusé a volontairement incendié la maison que sa famille et lui avaient été obligé de quitter le dimanche 3 octobre, alors que le nouveau locataire Silly n’occupait pas encore les lieux et que la famille Corbin venait d’effectuer son déménagement pour aller s’installer aux Fauquetteries.
Émilien Corbin se rendit seul entre 20 et 21 heures à la maison de Saint-Éman, par la brèche d’une haie il pénétra dans le jardin et s’approchant du four adossé à la maison, il alluma une allumette et mit le feu au chaume du toit ; l’incendie gagna rapidement le toit de la maison pendant que l’accusé revenait directement à son nouveau domicile, où il raconta à sa mère et à ses frères, assis autour d’une table, son acte criminel.
Emilien Corbin sur lequel les soupçons s’étaient presque immédiatement portés, ne tarda pas, lorsqu’il fut interrogé par les gendarmes et le juge de paix du canton, à reconnaître sa culpabilité et au cours de l’instruction qui suivit, il a persisté dans ses aveux tout en fournissant sur certains points de détail des explications contradictoires.
Il ne méconnaît pas avoir agi de sang-froid, il n’était pas pris de boisson et a pu se rendre un compte exact de la gravité de son acte.
Il est d’une intelligence médiocre et les récriminations de sa mère mécontente d’avoir quitté la maison de Saint-Éman ont pu lui inspirer l’idée de son crime.
Les renseignements recueillis sur l’accusé le représentent comme paresseux et menteur, et le médecin légiste qui l’a examiné au point de vue mental déclare qu’il est sans défense contre les impulsions mauvaises, qu’il n’est pas possible de ne pas faire état de son infériorité intellectuelle dans l’appréciation de sa responsabilité.
L’immeuble incendié servait à l’habitation, mais il n’était pas encore habité par le nouveau locataire au moment du crime, de sorte qu’il n’y eut pas d’accident de personne à déplorer ; les dégâts matériels causés par le sinistre peuvent être évalués à 3 000 francs environ.
En conséquence, le sus-nommé est accusé d’avoir à Saint-Éman, le 3 octobre 1920, volontairement mis le feu à une maison appartenant à autrui ; avec cette circonstance que cette maison servait à l’habitation.
Crime prévu par l’article 434 du Code pénal.
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Il a été ensuite procédé à l’interrogatoire de Corbin.
L’accusé, âgé de 20 ans, a renouvelé ses aveux. C’est pour se venger de M. Silly, le nouveau locataire, qui, dit-il, lui devait 10 francs pour un certain travail, qu’il a commis son crime.
L’interrogatoire terminé, c’est le défilé des témoins.
On entendit le gendarme Pépin, qui a fait l’enquête ; M. Silly, pour le compte duquel Corbin travailla une quinzaine de jours et qui ne doit rien à l’accusé.
Puis la famille succède à ces deux témoins.
Mme Corbin mère et les frères et sœur : Mary, dur d’oreilles, qui se renferme dans un mutisme presque complet ; Armand qui déclare : « Émilien (l’accusé) a dit, à la maison : Il y a le feu à Saint-Éman, c’est moi qui l’ai mis » et Thérèse, sa sœur, qui reste bouche close.
Le jeune Guillemet s’avance à son tour à la barre, mais « il n’y a rien à en tirer », et enfin le docteur Bouchard, chargé d’examiner Corbin au point de vue mental.
Le docteur conclut : « L’accusé est peu intelligent et peu développé et incapable de résister aux impulsions mauvaises. »
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Après le réquisitoire de M. Savidan, qui ne s’oppose pas aux circonstances atténuantes, et la plaidoirie de Me Gousselin, le jury s’est retiré pour délibérer.
Après trente minutes de délibération, il a rapporté un verdict affirmatif sur le crime, négatif sur la question : « La maison servait-elle d’habitation, » et accordant des circonstances atténuantes.
La Cour a condamné Corbin à cinq ans de réclusion.
Août 1921
Publication des tableaux de recensement de la population en 1921 : Saint-Éman est la plus petite commune du canton d’Illiers avec 99 habitants contre 93 en 1911 et parmi les cinq plus petites communes du département.
NDLR : en 2020, avec 108 habitants, Saint-Éman est parmi les trois plus petites communes du canton avec Cernay et Méréglise, et parmi les dix que compte le département d’Eure-et-Loir.
Janvier 1922
Tribunal correctionnel de Chartres, audience du 3 janvier :
La chasse:Journalier à Illiers, M. Bullou Eugène fut surpris chassant sur des terres gardées, situées sur le territoire de Saint-Éman.
50 francs d’amende lui sont infligés et la partie civile obtient 50 francs de dommages-intérêts.
Mai 1924
- Nécrologie : nous apprenons la mort de M. Gouabault, ancien instituteur, maire de Saint-Éman, décédé subitement.
Les obsèques de ce brave homme ont eu lieu le 16 mai (NDLR. : Jour du martyre de saint Éman).
- Élection municipale : les électeurs de Saint-Éman sont convoqués le dimanche 15 juin, à l’effet d’élire deux conseillers municipaux en remplacement de MM. Gouabault, maire, et Sineau, décédés.
Juin 1924
- Comice agricole à Illiers : A la publication du palmarès on trouve, dans la catégorie des « jardiniers de maison bourgeoise », le nom de M. Lebourgeois, jardinier-chef au château de Saint-Éman qui a obtenu une médaille d’argent.
- Élections : M. Percheron a été élu maire, au 2e tour de scrutin, en remplacement de M. Gouabault, décédé, et M. Silly, adjoint au 1er tour, en remplacement de M. Percheron, nouveau maire.
Septembre 1924
Faucardement des cours d’eau - M. le Préfet d’Eure-et-Loir vient de prendre l’arrêté suivant :
Le faucardement de tous les cours d’eau sera exécuté par les propriétaires intéressés conformément aux anciens règlements et usages locaux (...)
Les travaux et dépenses seront à la charge des propriétaires riverains, chacun au droit et en proportion de l’étendue de sa propriété (…)
L’opération comprendra le fauchage des herbes qui croissent dans le lit des cours d’eau et l’élagage des buissons, branches et cépées qui peuvent nuire à l’écoulement des eaux.
Immédiatement après la coupe des foins, les riverains des petits cours d’eau, rigoles, fontaines et ruisseaux, …, devront, outre le faucardement et l’élagage, enlever à la raclette, à la pelle croche ou par tout autre moyen, les vases, sables, pierres et autres objets qui nuisent à l’écoulement des eaux. Ils déposeront le produit de ce curage simple à un mètre au moins en arrière de la crête des berges.
Les travaux inexécutés ou inachevés seront faits ou terminés d’office à la diligence du maire de la commune et aux frais des intéressés, sans autre formalité, ni mise en demeure.
Le présent arrêté sera publié et affiché dans chacune des communes du département.
Les maires sont chargés d’assurer l’exécution des dispositions prescrites.
Le Préfet d’Eure-et-Loir : CASSE-BARTHE
Mars 1925
Tribunal correctionnel de Chartres, audience du 3 mars :
M. Sotteau Charles, 65 ans, demeurant à Saint-Éman, aurait été trouvé en attitude de chasse, il y a quelques semaines, sur un terrain dépendant de la propriété de M. Martin.
Il ne reconnaît pas le délit et conteste le procès-verbal dressé par le garde Sainsot.
Au nom de la partie civile, Me Brétillard demande une condamnation à des dommages-intérêts.
Après plaidoirie de Me Baston, le tribunal met l’affaire en délibéré.
Tribunal correctionnel de Chartres, audience du 10 mars :
Le tribunal rend son jugement dans l’affaire de chasse sans permis concernant M. Sotteau, cultivateur à Saint-Éman, dont les débats ont eu lieu à une précédente audience.
M. Sotteau est condamné à 16 francs d’amende et 25 francs de dommages-intérêts envers M. Martin, partie civile.