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La guerre de 1914-1918 : la grippe espagnole, l’ennemi invisible

La Première Guerre mondiale verra décéder de nombreux soldats atteints de tuberculose, comme le 2e classe Huvet Gabriel de Saint-Éman, on avance un chiffre récurrent de 150 000 morts par an. Un autre ennemi guette, il s’agit de l’épidémie de la grippe dite « grippe espagnole » due à une souche H1N1 particulièrement virulente et contagieuse qui gagne l’ensemble des tranchées de France dès le mois d’octobre 1918, et qui fera 400 000 morts en France avant de devenir une pandémie touchant toute l’Europe, les États-Unis, l’Inde, la Chine avec une estimation de l’Institut Pasteur de 20 à 50 millions de morts. Ces chiffres font toujours débat notamment du fait de la censure instaurée durant la Première Guerre mondiale et les difficultés de recensement à cette époque dans certains pays comme en Asie et en Afrique.

 

Le premier cas de « grippe espagnole » avait été officiellement diagnostiqué dès le 4 mars 1918 dans le camp militaire de Funston au Kansas auprès d’un fermier contaminé chez lui par des déjections d’oiseaux et enrôlé dans les forces alliées. Les premières troupes américaines, du groupe de la Manche, débarqueront au Havre, à Rouen, à Caen, et à Granville, puis d’autres débarqueront à Brest, à Saint-Nazaire. La maladie s’étend, et dès avril elle apparaît dans un cantonnement britannique à Rouen. La censure de guerre limite l’écho médiatique de la pandémie, surtout en octobre, afin de ne pas démoraliser les troupes dans les derniers combats qui allaient conduire à la victoire, et à l’armistice du 11 novembre. Une des victimes connues de cette grippe espagnole est l’écrivain et poète français Guillaume Apollinaire qui meurt à Paris le 9 novembre 1918 à l’âge de 38 ans mais qui sera déclaré mort pour la France en raison de son engagement durant la guerre. Il serait injuste de ne pas citer également le décès d’Edmond Rostang, l’auteur de Cyrano de Bergerac, en décembre 1918, victime lui aussi de cette épidémie. Certains pourront nous taxer de facétie si nous évoquons dans cette rubrique une autre victime de la pandémie, il s’agit de Frederick Trump, le grand-père de Donald Trump, 45e président des États-Unis, ce dernier fera peu de cas de la pandémie de la COVID 19 plus d’un siècle après...

 

Les constats suivants s’imposent : Pandémie de la grippe espagnole en 1918 : contamination par un oiseau dans le Kansas (États-Unis), pandémie du Coronavirus en 2020 : contamination par un pangolin à Wuhan (Chine). Un moustique pour l’épidémie du Chikungunya, un chien pour la Rage. Qui a dit nos amis les bêtes ?

Sous la pluie des obus, dans les tranchées boueuses, tombeaux à ciel ouvert, les soldats de la guerre 14-18, terrés comme des rats, enragés, se sont entre-tués, à coup de baïonnette, dans de féroces et sanguinaires corps-à-corps. L’homme est un animal. La guerre, cette barbarie, a ôté toute humanité à l’homme.

Et comme l’écrivit Léon Tolstoï : « De tuer les animaux à tuer les hommes il n’y a qu’un pas, tout comme de faire souffrir les animaux à faire souffrir les hommes ».

11 novembre 1918 – 11 novembre 2020

Deux dates, un télescopage d’actualités qui fait écho à la guerre 1914-1918, à sa commémoration, et aux pandémies sanitaires, avec ses morts et ses traumatismes. En l’année 1918, la France était endeuillée par la mort de ses vaillants poilus au cours de quatre années de sanguinaires combats, endeuillée aux portes de l’armistice, par ses innombrables malades de la grippe espagnole, épidémie complice et alliée de la guerre, pas de répit, pas de pitié. L‘année 2020, la France est confinée, paralysée par la pandémie du coronavirus, endeuillée par ses milliers de morts. Un siècle après, les mêmes images, celles des visages masqués, des magasins fermés, des hôpitaux mobiles de campagne, les mêmes mots, le même vocabulaire : confinement, couvre-feu, zone rouge, zone occupée, attestation de déplacement, l’ausweis de l’année 2020… De tout temps, chaque 11 novembre, la mémoire des soldats de la guerre 14-18 a été honorée par la population, une gerbe déposée au pied du monument, une minute de silence. Au cours de l’histoire, une seule exception à ces célébrations, ce fut pendant l’occupation allemande pendant la seconde guerre mondiale, se recueillir devant le monument des victorieux de la Grande Guerre était interprété comme un acte de résistance. Et aujourd’hui, pour la cérémonie du 11 novembre 2020, nous sommes informés que « La situation sanitaire actuelle ne permet pas d’organiser les cérémonies dans leur forme habituelle, les contraintes liées à la pandémie de la Covid-19 conduisent à retreindre la présence des habitants au strict minimum dans le respect des consignes préfectorales ». A Saint-Éman, les commémorations se feront en catimini, comme partout ailleurs, seules madame le maire, Michèle Cat, et son adjointe, Brigitte Guyon, déposeront la traditionnelle gerbe au pied du monument aux morts pavoisé de ses drapeaux tricolores.

Les archives nous livrent des photos prises à Paris, à Seattle, au Massachusetts, en France, aux États-Unis, entre 1918 et 1919. On y voit aussi bien un poinçonneur d’un tramway contrôlant le port du masque à la montée des voyageurs, que des piétons masqués, et des ambulanciers débordés. Les hôpitaux sont saturés, des hôpitaux de campagne en toile sont dressés à la hâte. Deux époques, rien n’a changé, pourtant les dirigeants, les édiles affirmaient haut et fort : « Plus jamais ça ! », « L’homme sait tirer les leçons du passé et de ses erreurs » sous nos airs dubitatifs et incrédules… la seule différence que nous y voyons aujourd’hui c’est que nous sommes passés des clichés noir et blanc à la couleur….

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