


Registre matricule de l’école de Saint-Éman
Liste du personnel enseignant et des élèves
au cours de la période 1884 -1933
Par un heureux hasard, un registre de l’école datant de la fin du XIXe siècle, en piteux état toutefois, a été découvert au fond d’un tiroir. On y découvre en outre de précieux renseignements sur le domicile des parents dans les différents hameaux du village ainsi que les métiers exercés. Ce document se révèle être une importante et fidèle image sociogéographique de Saint-Éman entre des périodes fortes de l’Histoire, de l’après-guerre de 1870 jusqu’à l’approche des heures sombres de la Seconde Guerre mondiale.
En page de garde du présent registre, nous trouvons également la liste du personnel enseignant nommé à l’école de Saint-Éman de 1887 à 1933 :
1- GOUABAULT Ferdinand, Célestin, Hippolyte, né le 17 février 1859 à Fontaine-la-Guyon (Eure-et-Loir). Nommé à l’école de Saint-Éman le 17 octobre 1887, à l’âge de 28 ans. Pour enseigner, il était titulaire d’un brevet élémentaire obtenu le 21 juillet 1880. Les enseignants qui lui succéderont seront tous issus de l’École Normale de Chartres. Le 2 mai 1890, il accueillera parmi les élèves sa propre fille Prisca née le 28 août 1884.
2- JAMET Alphonse, Denis, Michel, né le 20 juillet 1885 à Le Mée (Eure-et-Loir). Nommé le 1er octobre 1910, à l’âge de 25 ans. Il arrivait de l’école de La Loupe où il enseignait depuis le 17 octobre 1907. Il fut élève à l’École Normale de 1900 à 1903.
3- LECOMTE Maurice, Charles, né le 7 août 1897 à Germignonville (Eure-et-Loir). Nommé le 1er octobre 1919, à l’âge de 22 ans. Après ses études à l’École Normale de 1913 à 1916, la guerre, l’école de Saint-Éman fut sa première affectation en qualité de stagiaire, non titulaire du poste.
4- HALLOUIN-MOREL Hélène, née le 18 juillet 1898 à Neuilly-sur-Seine (Hauts-de-Seine). Nommée le 11 novembre 1921 à l’âge de 23 ans. Élève à l’École Normale de 1916 à 1919. Avant son affectation à Saint-Éman, elle avait enseigné à Chartres puis à Moutiers.
5- BILLARD Raymond, né le 23 janvier 1878 à Pré-Saint-Martin (Eure-et-Loir). Nommé à Saint-Éman à l’âge de 52 ans le 1er octobre 1930. Élève à l’École Normale de 1894 à 1897.
6- GIRARD Louise, Léonie née le 1er juin 1910. Élève à l’École Normale de 1927 à 1930, elle exerça à Marboué, puis Illiers avant d’être nommée à l’école de Saint-Éman le 1er octobre 1933 à l’âge de 23 ans.




L’autre richesse de ce registre est de connaître l’ensemble des élèves qui ont fréquenté l’école de Saint-Éman à partir de 1884, année de l’inauguration et de l’ouverture de la « maison d’école » par le Maire, le Comte Edgar de Goussencourt, ... jusqu’en 1933, année de nomination de l’institutrice Louise Girard.
Les différents feuillets collectés ont ainsi permis de répertorier jusqu’à 239 écoliers, avec pour chacun d’entre eux :
-Nom et prénom, date de naissance.
-Date d’entrée et de sortie définitive de l’école.
-Date de l’obtention du certificat d’études primaires.
-Observations sur les aptitudes, la conduite de l’élève pendant sa scolarité.
Si l’élève quittait l’école avant l’âge de 13 ans ou sans avoir obtenu le certificat d’études, l’enseignant devait indiquer par quel moyen l’enfant allait compléter son instruction. Les mentions portées étaient visées par l’inspecteur primaire, notamment D. Bonnechon sur la période 1897-1911.
Dans cette dernière rubrique, en feuilletant le registre, on peut trouver diverses observations et appréciations nous éclairant sur la scolarité des enfants du village et sur l’avenir qui les attendait… happés par le dur labeur des fermes pour un grand nombre d’entre eux… tout juste sortis de l’enfance !
Florilège qui pourrait s’inspirer de Jacques Prévert entre récompenses, joies et moments douloureux… avec en tête la petite ritournelle...
Année scolaire
1945-46


« Il n’a jamais fréquenté l’école avec assiduité. Il travaille à une tuilerie ».
« Bonne conduite. Il est domestique de ferme ».
« Elle travaille dans sa famille et en apprentissage pour la couture ».
« Décédée » … à l’âge de 9 ans.
« Aptitudes passables, loué comme domestique de ferme aux Perruches »... à l’âge de 12 ans.
« Retiré par ses parents de Guignonville où il était chez sa nourrice ».
« Certificat d’Études Primaires : Excellente élève à tous points de vue ».
« Peu doué, fréquentation irrégulière, ne sait pas lire ».
« Aucune aptitude et peu de travail ».
« Ne sait rien ».
« A 13 ans est louée. Bon caractère, douée mais peu de facilités de travail ».
« Les parents ont acheté une petite maison à La Loupe ».
« 13 ans, reste à la maison pour aider sa mère à garder les bestiaux, peu de facilité mais enfant aimable et docile ».
« Quitte l’école, apprend le métier de maçon ».
« Mère morte, est confiée à un oncle demeurant à Pontgouin ».
« Vient de l’école de Châtillon, est louée à Arrou ».

« Orphelin, est placé chez un de ses cousins cultivateur. Bon petit caractère, doux et appliqué ».
« Quitté l’école, malade-morte » … à l’âge de 7 ans.
« N’a pas fréquenté l’école 50 jours par an, peu doué ».
Les nom, prénom, profession et adresse des parents ou tuteurs sont également renseignés dans le registre matricule de l’école.
Les rubriques, outre les fiches périodiques de recensement, permettent d’inventorier les métiers exercés sur le territoire du village entre une agriculture omniprésente et un artisanat plus discret dans les années 1900.
Les enfants de cultivateurs, journaliers et charretiers étaient les plus nombreux à fréquenter l’école. Ils partageaient la classe et la cour de récréation avec d’autres écoliers venus d’horizons divers et bien étrangers parfois aux travaux agricoles.
L’élevage de moutons était important dans la région, parmi les parents d’élèves en cette fin du XIXe siècle, on comptait des bergers parmi les familles Chesneau et Beslé, ce dernier nous offrant un bel exemple d’aptonyme (*).
(*) NDLR : Un aptonyme indique le patronyme d’une personne correspondant d’une manière troublante à son métier.
Le domaine des Pâtis avec son château offrait de nombreux emplois, comme ceux de valet de chambre avec Grégoire Flache en 1890, jardinier : Charles Cherrier en 1896, régisseur : Louis Langlois en 1901, et garde particulier : Alfred Allain en 1911.
Chaque village se devait d’avoir au moins un café… en 1884, il était tenu par Alfred Beaudoux, déclaré dans le registre : « cafetier à Saint-Éman ».
Dans les environs, la présence de moulins à vent et à eau (alimentés par La Thironne et Le Loir) est avérée par la présence de meuniers comme Isidore Ratier à Saint-Éman. De nombreux lieux à Illiers en témoignent : le moulin à vent (route de Courville), le moulin de la Billanche (route de Saint-Avit-les-Guespières), le moulin de Montjouvin (route de Brou), le moulin à vent (Aux Dauffrais, route de Saint-Éman).
Dans notre article consacré à la briqueterie-tuilerie de Saint-Éman nous évoquons les différentes familles qui se sont succédé pour l’exercice de cet artisanat local. Nous les retrouvons dans le registre, sous le vocable de tuilier avec leurs enfants fréquentant l’école :
Charles Allain en 1886 et 1892.
Julien Marchand en 1900.
Joseph Harranger en 1899 et 1910.
Louis Silly en 1920 et 1926.
Le bon entretien des chemins et des routes était également une préoccupation pour les municipalités, les cantonniers étaient nombreux. A Saint-Éman, Alcide Beaudoux, et Céleste Huvet, parents d’élèves, exerçaient localement ce métier.
